jeudi 4 septembre 2014
Martine Aubry: la petite musique d'un éventuel recours
Martine Aubry, en sortant tout en nuances de la réserve observée depuis deux ans sur les gouvernements socialistes successifs, fait entendre une "petite musique" qui pourrait la placer un jour en position de "recours" pour le PS, estiment des observateurs.
Lors d'une première prise de parole, très critique, sur la réforme territoriale et l'absence de cap et de méthode prévalant selon elle dans les allées du pouvoir, le 18 juillet dernier à Paris, Mme Aubry avait indiqué qu'à la rentrée elle en dirait plus.
Elle a tenu parole et s'est rappelée ces jours-ci à l'attention des siens et de l'opinion, en obtenant par un simple communiqué samedi le revirement en 24 heures du Premier ministre Manuel Valls sur l'encadrement des loyers. Au lieu d'être limité à Paris, Lille et toute autre ville volontaire aura finalement permission de l'appliquer.
Cette victoire, rapide, de l'ex-Première secrétaire du PS, alors qu'elle était absente de l'université d'été du parti à La Rochelle où a pu s'exprimer la fronde à l'égard des orientations du gouvernement Valls 2, pourrait sonner comme un avertissement à Matignon.
Mais pour la rentrée des classes, Mme Aubry a eu mardi le triomphe modeste et fait preuve d'un savant équilibre entre réprimande et félicitations à l'égard de l'élève Valls.
Elle a d'abord adhéré à la réforme des rythmes scolaires, félicitant aussi le gouvernement d'avoir rouvert les écoles aux enfants de deux ans, avant de se montrer plus caustique sur l'encadrement des loyers.
"Je me réjouis que le Premier ministre nous ait donné l'opportunité d'appliquer la loi qui a été votée à l'unanimité de la gauche", a-t-elle déclaré avec une ironie palpable devant la presse.
Un responsable du PS a préféré retenir la modération du propos. "Sur les loyers", Mme Aubry "n'a pas dit que les mesures prises par le gouvernement sur le logement allaient dans le mauvais sens", mais a seulement "souligné que Lille était partant pour le faire (encadrement) et sait elle-même que la loi (Alur) n'est pas détricotée et portait sur bien d'autres choses que l'encadrement des loyers".
- Clin d??il et petite musique -
Pour la maire de Lille il s'agit, selon ce responsable, d'"un petit clin d??il à Cécile Duflot".
Interrogée mardi par un journaliste sur le "discours amoureux" de Manuel Valls envers l'entreprise, Mme Aubry, comme en écho aux propos du Premier ministre, ovationné à l'Université d'été du Medef le 27 août, a répondu qu'elle aussi aimait l'entreprise, si elle "investit sur l'avenir" .
Mais là encore, en dehors d'un appel au Medef à prendre ses responsabilités, elle s'est refusée à commenter plus avant l'action gouvernementale.
"Formellement, dans ce que dit Martine Aubry sur l'entreprise, il n'y a pas de décalage avec ce qu'a pu dire le Premier ministre (devant le Medef)" qui a appelé aussi, rappelle le responsable du PS, les entreprises à honorer leurs engagements.
"Martine Aubry, aujourd'hui, on verra demain, fait entendre une musique mais qui reste dans un espace extrêmement maîtrisé. Elle n'a pas la culture frondeuse. Elle portera la critique avec la volonté d'être utile", a estimé ce responsable du PS.
Contrairement aux députés frondeurs du PS, dont certains proches d'elle, Mme Aubry, interrogée sur "l'orientation socio-libérale" du gouvernement ou sur le dernier remaniement, s'est refusée à tout commentaire.
Une attitude caractéristique, selon le politologue Eddy Fougier, chercheur associé à l'IRIS, de quelqu'un "qui se positionne non pas en porte-parole des frondeurs, mais en recours, marqué à gauche, du PS".
Mme Aubry qui, face à François Hollande, a recueilli 45% des voix au second tour des primaires socialistes pour la présidentielle en 2011, a rappelé l'analyste, "a cette légitimité là aux yeux des militants".
Si l'échec de M. Hollande sur le front du chômage devenait définitif, "la personnalité de Martine Aubry, incarnant une gauche plus traditionnelle face à Manuel Valls, lui permettrait de recréer de la cohérence" au moment où le PS en aurait grandement besoin. "Et, du coup, de se positionner pour un retour éventuel sur le devant de la scène", note M. Fougier.
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